Une présentation des chenilles processionnaires et de ses enjeux pour la santé.
Action
Déploiement d’un outil de repérage des impacts santé des projets d'aménagement : la grille URBAN-ISS
Mots clésRecouvrant des réalités sociales, environnementales, économiques et politiques, la santé est désormais reconnue comme un enjeu d'aménagement du territoire. Les villes et territoires urbains, soumis à des évolutions et des interactions nombreuses, peuvent avoir des impacts positifs – mais également négatifs – sur la santé et le bien-être des populations qui y vivent, grandissent, étudient, travaillent…
Pour autant, parler de santé en urbanisme est loin d'être évident et courant. L'intégration des enjeux des inégalités sociales de santé (ISS) dans l'aménagement de la ville est encore peu entreprise et visible dans les démarches opérationnelles de conception urbaine. Pourtant, les ISS sont particulièrement marquées en France, parmi les plus élevées d'Europe. Un rapprochement concret est aujourd'hui nécessaire entre acteurs de l'urbanisme et de la santé, qui partagent des intérêts convergents pour le bien-être des habitants.
C'est dans cette perspective que la collaboration entre l'IFERISS (Institut Fédératif d'Etudes et de Recherches Interdisciplinaires Santé et Société) et l'AUAT (Agence d'urbanisme et d'aménagement de Toulouse) a vu le jour et s'est instaurée au travers de plusieurs projets. Cette dynamique a donné lieu à la construction d'un outil, la grille Urban-ISS. Elle a pour objectif d'accompagner les acteurs de l'urbanisme dans la prise en compte des enjeux de santé et d'inégalités sociales au sein des projets d'aménagement.
Aujourd'hui, cet outil est déployé au travers du projet URBAN-ISS Pro qui propose une formation en deux modules pour sensibiliser aux questions d'urbanisme favorable à la sante et prendre en main la grille. Ce projet, financé par l'ARS Occitanie, est porté par le collectif des agences d'urbanisme en Occitanie (Coll'Oc) et la plateforme AAPRISS (Apprendre et Agir pour Réduire les Inégalités Sociales de Santé).
Pour en savoir plus et accéder aux prochaines sessions de formation, nous vous invitons à consulter la page URBAN-ISS.
Une recherche partenariale au bénéfice des acteurs de la ville
Le partenariat engagé entre l'AUAT et l'IFERISS, et qui se poursuit aujourd'hui entre le collectif des agences d'urbanisme en Occitanie et la plateforme AAPRISS, illustre la faisabilité et tout l'intérêt d'une collaboration « interdisciplinaire » entre urbanistes et chercheurs en santé publique.
Initié en 2004 à l'occasion d'un séminaire prospectif en urbanisme sur les enjeux de santé publique, l'Agence d'urbanisme et d'aménagement Toulouse (aua/T) et l'IFERISS se sont saisis du contexte opérationnel favorable pour faire émerger, avec la collectivité, une nouvelle approche santé, par expérimentation conjointe de la démarche d'Evaluation d'impact sur la santé (EIS). Cette expérimentation a servi de socle à l'engagement en 2017 d'un projet de recherche réflexif de co-construction d'un outil, destiné aux aménageurs de la ville, visant à questionner les opérations d'aménagement de l'agglomération toulousaine au regard des ISS, afin d'en réduire les impacts négatifs.
Cette démarche exploratoire, ayant une finalité « pragmatique », a été l'opportunité d'une meilleure connaissance mutuelle des enjeux, des pratiques et des cadres d'intervention respectifs.
Elle a posé les bases d'un axe de travail à la fois interdisciplinaire (santé et urbanisme) et intersectoriel (recherche et praticien de l'urbain), qui a abouti au développement d'un outil opérationnel et innovant : la grille Urban-ISS.
Un outil opérationnel et innovant
Cette mobilisation conjointe s'est attachée à une production opérationnelle et, dans le même temps, innovante : un outil d'aide à la conception, estampillé « Dépistage santé et ISS », destiné aux acteurs de l'aménagement urbain. Cette échelle et ce degré d'opérationnalité n'avaient été que peu explorés jusqu'alors.
Cet outil, expérimenté sur plusieurs projets urbains de la Métropole toulousaine, permet d'évaluer l'impact positif ou négatif d'un projet sur les déterminants de la santé. Il permet surtout d'appréhender si cet impact est équitable entre les populations qui partagent la ville (catégories socio-professionnelles, genre, générations) et d'évaluer ainsi les potentielles inégalités sociales de santé générées par le projet.
Proposant une manipulation très rapide, une heure environ, la mobilisation de l'outil peut aisément s'intégrer à la fois dans la temporalité des projets d'urbanisme et dans la temporalité des services techniques en charge des dits projets, déjà très contraints. Sans imposer une procédure d'évaluation lourde supplémentaire, cet outil offre l'opportunité d'un temps efficient de réflexion partagée entre acteurs impliqués sur le projet urbain, dans le souci d'en améliorer les lignes de définition au regard de la santé et du bien-être des habitants.
Comprenant une vingtaine de questions sur la ville et la santé, invitant à quantifier et qualifier l'impact (-2 très négatif à +2 très positif) du projet d'aménagement urbain sur la santé de différentes populations, la grille proposée ne demande pas de connaissance particulière en santé pour être manipulée et discutée. Elle peut donc être remplie de manière autonome, avec ou sans personne sensibilisée à la santé.
Il s'agit d'un outil hybride, de par son processus de construction (chercheurs en santé publique, aménageurs et urbanistes), mais également de par son usage volontairement transdisciplinaire : il peut en effet être mobilisé par les urbanistes, environnementalistes, citoyens, élus, … à l'occasion de réunions.
Son utilisation constitue une opportunité pour créer un espace – temps de socialisation et d'acculturation réciproque entre acteurs relativement, voire tout à fait, éloignés jusqu'à présent.
S'il ne remplace pas une démarche d'EIS, il peut néanmoins s'intégrer plus aisément dans les pratiques quotidiennes des urbanistes pour concevoir des projets urbains intégrant la problématique des ISS, identifier les leviers pertinents en faveur de la santé, guider les décideurs vers la réalisation d'une EIS sur tel ou tel projet. Il peut également constituer un support de plaidoyer ou plus simplement un prétexte à l'échange entre acteurs urbains et acteurs de promotion de la santé. Chacun se réapproprie la grille selon son besoin.
Des perspectives encourageantes de déploiement
Cette démarche, conduite jusqu'à présent par des « experts », apporte de nouveaux éléments de réflexion et de décision pour un débat sur l'urbanisme, que l'on évoque de nouveaux quartiers ou des opérations de renouvellement urbain. Ce débat, ouvert potentiellement aux élus et aux citoyens, s'appuie alors sur des informations précises, et ancrées sur le territoire, qui illustrent le lien entre santé, bien-être et projets urbains.
L'utilisation de l'outil entre acteurs issus de domaines différents favorise l'appropriation partagée des sujets de la santé et des inégalités sociales de santé, réservés jusqu'alors aux seuls acteurs de santé publique, voire du social. Elle représente une opportunité d'acculturation et de formation réciproque et concomitante des différents acteurs de la ville, qui les légitime en tant qu'acteurs de la santé publique.
L'objectif est bien de penser la santé et les ISS à tous les niveaux du projet urbain : à chaque étape de conception, de définition, voire de mise en oeuvre, auprès de l'ensemble des acteurs impliqués et à toutes les échelles de territoire. La simplicité d'utilisation de l'outil joue en faveur d'une utilisation fréquente au sein des services aménageurs. Sa systématisation témoignera d'un essaimage réussi !
Les expérimentations qui ont permis de définir l'outil dans son format actuel ont montré divers niveaux ou approches de la part des acteurs mobilisés. Sa souplesse d'utilisation permet une large gamme d'appropriation, en fonction des degrés de sensibilisation ou d'ambition. Chaque acteur est ainsi en capacité de se l'approprier, de le (re)mobiliser et de le faire « parler » au regard des caractéristiques du ou des projets urbains, tout au long des processus de conception, voire de l'expérimenter sur d'autres types de projet.
L'outil, sous licence Creative Commons BY-NC-SA, a depuis le départ vocation à être manipulé, évoluer, se développer, au bénéfice d'une meilleure intégration des enjeux de santé et des ISS en aménagement du territoire.
Verbatim
« Original »
« Ça permet des échanges, ça permet de questionner...Il y a un côté brainstorming »
« Oui, puis ça permet toujours une prise de recul sur les projets, à un moment où on a la tête dans le guidon »
« Une heure, c'est acceptable dans un emploi du temps, sur un projet de 10 ans, ça peut s'envisager »
« Ça permet de rencontrer des personnes avec qui on n'a pas l'habitude de travailler »
« Oui ça peut nous permettre d'avoir des points de vigilances sur le projet »
Source :
Article adapté du « Dossier-ressources Urbanisme et Santé-Environnement » et édité par le Réseau Régional Éduquer en Santé-Environnement Occitanie.